lundi 17 septembre 2007

Une dernière danse

Il ne me reste plus que trois jours au Malawi et j ‘aimerai atteindre le bout du lac avant de repartir ; l’endroit s’appelle Cape Mac Clear. Sorti de mon hotel, je suis pris en stop par la première voiture qui passe. Il est 8h00 du mat’ et big mama assise à mes côtés à une choppe à la main. On est samedi, apparement on profite beaucoup du weekend dans le coin. Bref, le chauffeur est clean et me conduit jusqu’à la gare des bus de Salima, ce qui m’évite une heure de boîte à sardine, bonheur. Malheureusement, elle ne m’évitera pas l’heure d’attente à Salima, temps pour remplir le bus. Je retrouve les ambiances bousculées où les fortes odeurs de friture, de poissons avariés, de poubelles et de transpiration se mélangent dans la chaleur matinale. Je mange sur le pouce dans la gare des bus. Des pattes de poulets, griffes incluses, sont proposées. Je me contenterai d’ailes cette fois-ci. Les gamins vendent de l’eau bouillie dans de petits sachets transparents accrochés au bout d’un bâton pour atteindre les fenêtres des bus les plus hauts. Les maïs quant à eux, sont grillés et piqués sur un long trident. Les gens passent la moitié de leur corps à travers la fenêtre pour attrapper la nourriture des paniers tandis que les vendeurs les tiennent à bout de bras au dessus de leur tête. Le bus est comble, en route jusqu’à la jonction. Sur le trajet, c’est encore et toujours la pauvreté qui frappe. Certain paraissent perdus, déboussolés, noyés dans l’alcool à la recherche d’une piecette ou de nourriture dans les détritus. Les haillons n’ont plus d’autre couleur que celle de la crasse. Le peuple qui se trouve dans le bus préfère d’ailleurs l’ignorer. Tous font comme il peuvent pour vivre ou survivre avec le sourire.. Ils ne connaissent rien d’autre, pas de point de comparaison pour se sentir frustrés. A la jonction c’est contre un pick up que j’échange mon bus. C’est installé dans le back, sur d’énormes sacs de choux, les jambes vers l’extérieur dans le vide que nous traçons à travers la piste durant 4h pour parcourir une distance ridicule. Les rencontres sont intéressées, tous ceux qui m’abordent sans exception me demandent mon adresse ou mon numéro de téléphone pour correspondre avec moi en espérant un voyage en Belgique ou de l’argent en retour. A l’arrière du pick up, l’ambiance est familiale. Même les petites frictions, entre personnes de differents points du pays , dont je ne comprend pas le sujet semblent se passer comme s’ils se connaissaient depuis longtemps. Assis sur mes choux, je peux profiter pleinement du paysage. Des milliers de baobabs majestueux me défilent sous les yeux. La plaine arride s’étend à perte de vue. Chaque passage d’un véhicule en sens opposé nous couvre de poussière. Plus de Muzungu ou de black dans le pick up ; un seul peuple uni par la terre sous une même couleur ; l’orange… Les voyages s’acumulent avec la fatigue, mais ne sont pas encore terminé pour aujourd’hui. A Monkey Bay, je dois trouver un moyen de joindre le Cape Mac Clear. Pas de transport public et la dernière navette pour le Cape vient de partir. J’ai eu ma dose, je reste ici, d’autant plus que le prix du taxi est exhorbitant. Le gars qui m’a proposé le taxi me conduit à un hotel près du lac. Ce seront mes derniers 3/4h de marche pour aujourd’hui, pas fâché d’arriver. Dans le village "perdu" juste avant l’hotel tout aussi paumé, on entend chanté au loin. C’est le weekend de la célébration pour les filles et garçons atteignant l’âge de la puberté. Juste le temps de déposer mes affaires dans ma chambre et je file avec le gars qui m’accompagnait vers le village. C’est le jour de la célébration des filles ce samedi et celui des garçons demain. Le village se compose d’une cinquantaine de huttes aux toits de chaûmes. Ils vivent principalement de pêche, d’agriculture. On ne trouve aucune infrastructure dans le village. Cette pauvreté rapproche très fort les gens entre eux. Partout où je me suis arrêté, j’ai toujours ressenti le peuple africain comme très unis, très soudés dans leurs joies comme dans leurs malheurs. Dans ce village mon sentiment perdure. Tous rassemblés pour fêter l’évenement, une seule et même voix (particulièrement féminine) réssort de cette immense chorale accompagant les percussions. Dans l’euphorie du moment, les gens chantent et dansent sans retenue traversant les ruelles du village dans un nuage de poussière uniforme à l’image de ceux qui la soulève. Le flash de mon appareil photo rend fou les enfants qui n’hésitent pas à crier comme pour déclarer une victoire à chaque déclenchement. Le moment est intense et durera jusqu’au bout de la nuit, avec des dances tribales autour du feu. Les images qu’on peut se faire de l’Afrique profonde sont celles de cet évenement intemporel. Pour ma part, il faut que je mange et que je dorme. Je ne regretterai pas toutes ces heures de voyage de nouveau !

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